Guillaume APOLLINAIRE. Manuscrit autographe, Récit de ma dét - Lot 8

Lot 8
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Guillaume APOLLINAIRE. Manuscrit autographe, Récit de ma dét - Lot 8
Guillaume APOLLINAIRE. Manuscrit autographe, Récit de ma détention à la Prison de la Santé, [septembre 1911] ; 1 page et demie petit in-4 (22 x 17 cm) sur un feuillet de papier ligné arraché d’un cahier (bords effrangés avec déchirures). Récit de son arrestation et de son incarcération à la Santé. « Lorsque le juge d’instruction Monsieur Drioux m’eut déclaré que j’étais inculpé de complicité de vol par recel, on m’amena dans la salle de garde des inspecteurs de la sûreté où bientôt MM. Hamard Robert et un jeune homme secrétaire du chef de la sûreté vinrent me prendre et me firent monter en automobile pour aller perquisitionner chez moi. Pendant ce trajet ces messieurs furent charmants. [ ] Chez moi, je changeai de flanelle et de chemise, préparai trois faux cols et quelques mouchoirs. Ces messieurs étant tous là voulurent bien me faire quelques compliments sur mon intérieur et bornèrent la perquisition à la recherche sommaire des lettres de Piéret que j’avais réunies. [ ] L’automobile me ramena à la préfecture où je fus confié à M. Soubeyran, inspecteur, brave homme natif de Tarascon, qui me plaignit et me consola par son optimisme et sa gaieté. Je dînai dans la salle de garde, dîner léger arrosé d’un peu de vin et d’un peu de cidre avec de la glace qui me fit du bien. Ensuite nous allâmes M. Soubeyran, un autre inspecteur tout jeune et moi jusqu’au bureau de tabac du boulevard St Michel à pied. Je pus acheter des allumettes du papier à cigarettes un peigne et du savon. Nous prîmes un fiacre qui nous mena jusqu’à la porte de la prison de la Santé. Deux gardes à la porte et la lourde porte s’ouvre avec bruit. Dès l’intérieur l’uniforme des gardes de la prison me cause une impression sinistre. M. Soubeyran me remet un greffier. A ce moment dans les couloirs tristement éclairés, c’est un bruit sourd de pas et de fusils de la patrouille de garde municipaux. Il est dix heures du soir. Des bruits divers viennent de la rue, mais les couloirs sont silentieux et j’oublie l’impression heureuse que m’avait donnée la cour de la prison pleine de plantes grimpantes. Les couloirs où nous allons le greffier et moi sont innombrables. Ensuite, plusieurs interrogatoires sommaires. [ ] On me fait prendre des draps une couverture une grosse chemise de toile avec une rayure bleue sur les coutures. Puis le greffier me remet à un autre garde qui m’amène jusqu’à la cellule 15 de la 11 e division, il l’ouvre et m’y laisse en me disant d’attendre. Un autre garde arrive qui m’interroge encore et avec brusquerie me dit de me déshabiller. Il ne me laisse que les caleçons et la flanelle me remet ma pipe mes allumettes et mon tabac et m’enferme dans la cellule qui est spacieuse, je la vois d’un coup d’œil, fais mon lit, mets la grosse chemise et me couche, ma tête est vide, je me relève pour fumer une pipe et me couche pour de bon. J’ai sommeillé sans dormir, la lumière électrique me frappe au visage, cette lumière a l’air d’une sanie qui tombe immonde sur moi. Des bruits de couloirs, des pas feutrés, des patrouilles. Et le matin avec le jour la lugubre lumière s’éteint. » Exposition Apollinaire, Bibliothèque nationale, 1969, n° 260. Album Apollinaire (Pléiade 1971), p. 156-157
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